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BAYROU EXPLIQUE A PIERRE MARCELLE ET A LIBERATION

En ce dimanche 11 décembre, Pierre Marcelle, responsable de la chronique « Dégage » de Libération et fameux pour ses « Quotidienne(s) », publie un billet intitulé « François Bayrou , j’y comprends rien ».

Dans dans sa volonté d’exprimer un avis iconoclaste, visionnaire et politiquement incorrect, cette note ressemble à un brillant argumentaire de café du commerce, mâtiné de langue de bois copéïste et de saillie mélenchonienne. Tout ce que j’aime. Mais ayant des vélléités philanthropiques et ayant fréquenté le siège du Modem pendant 5 ans, je m’en vais lui expliqué ce Bayrou auquel le triangle d’or du milieu médiatique ne comprend rien, puisqu’il échappe aux variations saisonnières des modes du show biz politique, qui permettent aux chroniqueurs d’avoir la sensation de se renouveler, quitte à écrire cycliquement les mêmes absurdités.

Pourtant la chronique de Monsieur Marcelle commence par une constat que je partage et qu’il ne fait pas bon exprimer : « Ça y est, l’homme orange est candidat! Putative depuis cinq années, annoncée depuis deux semaines et officielle depuis mercredi, l’annonce de l’entrée dans la lice du champion du p’t’êt’ ben qu’oui – p’t’êt’ ben qu’non achève de figer la présidentielle dans sa caricature. Elle souligne jusqu’à l’absurde la personnalisation de ce rite quinquennal dont l’essence plébiscitaire va à l’encontre du principe démocratique même, mais sur un mode, cette fois, franchement drolatique. » La mention de « l’homme orange » est pour moi très parlante, bien que ne se référant pas à François Bayrou, mais à une chanson énigmatique de Michel Jonasz, dont la poésie m’a longtemps fasciné, bien que son message – en lien avec la déshumanisation progressive de la société, ainsi dirigée vers une nouvelle forme de dictature – nécessite une certaine attention pour être perçu. Là où je rejoins Pierre Marcelle c’est dans le constat que la personnalisation à outrance du rite présidentiel porte une « essence plébiscitaire contraire à la démocratie ». Dans cette sentence aux apparences révolutionnaires, Pierre Marcelle, trop cultivé pour l’ignorer, fait en réalité du Mendes-France, puisque l’inflexible marrane de l’Eure sacrifia sa carrière politique aux portes de la magistrature suprême, dans la prescience des dérives futures de la conjugaison du développement du système médiatique et du suffrage universel direct.

Or Mendes-France était loin d’un révolutionnaire et sans doute l’homme politique le plus proche de la ligne du Bayrou de la dernière décennie, c’est-à-dire humaniste et nuancé. Pour le reste, ce premier paragraphe de Marcelle, annonce la couleur, celle du gros trait sans argument, de la crispation sur des lignes bien clivées, dans l’obsession d’un bi-partisme stricte, ne laissant aucune place à la subtilité et à un pragmatisme non inspiré du calendrier politique, mais de l’analyse juste de la situation. On comprend néanmoins que le bi-partisme en question ne saurait se trouver dans l’antagonisme traditionnel entre PS et UMP, mais entre libéralisme et anti-libéralisme, comme si chacun de ces camps ne peut être qu’univoque, puisqu’ici libéralisme est considéré comme tout ce qui ressemble de près ou de loin à un système vaguement capitalistique, comme si toutes ses déclinaisons aboutissaient à la même société.

Si Bayrou, dont je tenterai de définir plus loin certaines caractéristiques personnelles, est la caricature de la perversité électorale, je ne saurai que me glacer d’effroi devant les autres prétendants. Celui que Pierre Marcelle défini comme le « champion du p’t’êt’ ben qu’oui – p’t’êt’ ben qu’non » est juste le seul candidat dont toutes les positions ne sont pas nourries à la seule tambouille idéologique et qui n’a quasiment pas varié d’un iota dans ses convictions (car il en a), ni dans le – juste – diagnostique qu’il a établi de notre société. Il est ici question de considérations coperniciennes, puisque ce n’est pas Bayrou qui a bougé de son axe au regard de la sphère partisane, mais bien cette dernière qui n’a cessé de tourner autour de Bayrou, si ce n’est de louvoyer. On le voit bien en ce moment où PS et UMP, font à nouveau la danse du ventre devant le candidat centriste, après l’avoir, accompagnés de toute la presse, voué aux gémonies, quand il était passé de mode et que ses soutiens furent aspirés par l’astre ministériel. Tandis que l’UMP, n’en fini plus de lancer ses anathèmes sur telle ou telle catégorie pour attirer les électeurs de Marine Le Pen, que le PS n’arrive pas à résoudre le paradoxe lui permettant de se montrer de gauche sans effrayer les marchés ni s’adresser au peuple, que Mélenchon invente la dictature du prolétariat et le FN, le national socialisme depuis qu’il s’est converti à l’interventionnisme après avoir été le chantre du plus parfait libéralisme, Bayrou continue de thésauriser sur son constat visionnaire concernant dette et éjection de l’être du centre du projet sociétal, sans pratiquement bouger de sa ligne.

Je connais les arguments des uns et des autres, et notamment de celui, Mélenchon, qui a fait de l’inflexible béarnais sa cible préférée. Ces arguments – fondés sur les votes suivistes de l’UDF, quand il était un satellite du RPR – relayés par sa garde rapprochée, de Clémentine Autain à mon quasi voisin Alexis Corbière (par ailleurs homme sympathique et vrai politicien de terrain, empathique et généreux), font rire quand on pense que le dit Mélenchon, pourfendeur du système médiatique dont il est pourtant le symbole narcissique – que dire de la web série dont il est le héros, ou de son admiration devant ses photos de presse – est une image caricaturale et fabriquée : homme de nuance et de culture dans le privé, grossier personnage dans le public, pensant séduire ainsi le peuple, alors qu’il est surtout populaire chez les cadres et les professions libérales*. On s’amuse d’autant plus de l’acharnement de ses Frontistes de gauche à rappeler les votes de l’UDF, antérieurs à la création du Modem, pour prouver que François Bayrou est un affreux sous-marin de la droite la plus réactionnaire, que le brave Jean-Luc Mélenchon, ex mitterrandiste en diable, a lui même voté l’essentiel des projets socialistes, au temps de sa splendeur au sein du parti de la rue de Solférino. A qui viendrait-il aujourd’hui à l’idée de lui mettre sur le dos, à la fois les belles heures de la gauche, comme ses plus sombres turpitudes affairistes ?

Mais revenons-en à notre François Bayrou et à ce MoDem, dont je me suis moi-même éloigné ces deux dernières années, mais dont je ne saurai remettre en cause la probité et la détermination. Les deux ont leur importance, parce que, si Bayrou n’a jamais dévié, les militants centristes, eux, se sont toujours donnés au plus offrant, reniant maintes et maintes fois leurs convictions et allant toujours dans le sens du vent, bien que revenant toujours à leur place d’origine tel le culbuto politique. Et là est tout le problème et le drame Bayrouïste. François Bayrou n’est pas un révolutionnaire, n’en déplaise à Jean-François Kahn, mais un homme droit, fidèle, intègre, de grande conviction et fondamentalement libre. C’est rarissime en politique, et, hélas, encore plus au centre. C’est aussi pour ça que, bien que conscient de la nécessité d’être porté par un appareil pour gagner le pouvoir, il n’a jamais été à l’aise au sein de l’UDF, et encore moins du MoDem pourtant fondé autour de sa personne, se désintéressant autant des querelles intestines que des revendications éparses des militants. Il s’agit tant de sa force que de sa faiblesse, et sans doute nombre de Français, pas Pierre Marcelle, le sentent-ils. Il sont près à soutenir l’homme, mais pas son mouvement, pourtant aujourd’hui resserré autour d’un carré de vrais fidèles, bien que l’on y voit à nouveau revenir les girouettes parties à la bonne heure se compromettre dans le giron Sarkozy.

François Bayrou se sent vraiment un destin, ce qui est inhérent à celui qui veut devenir président et manque souvent aux candidats socialistes, justifiant leurs défaites. Il a le handicap d’un sérieux sans faille, qui confond souvent se prendre au sérieux avec faire les choses sérieusement, une image trop flatteuse de sa personne, un manque d’humour endémique qui a fait des ravages dans son premier cercle et auprès des militants, une détestation sincère – à la différence de celle de Mélenchon – pour les médias avec lesquels il a bien du mal à composer, bien que souhaitant se soigner (j’y vois là une certaine qualité) et une rigidité intellectuelle qui peut donner le meilleur comme le pire. Au surplus, le personnage est distant et pas vraiment sympathique, y compris avec ses collaborateurs. Mais là où il semble s’être bonifié, c’est dans une capacité nouvelle à prendre en compte certain de ses défauts, à commencer par cette difficulté à écouter qu’il pensait balancée par sa capacité d’analyse exceptionnelle et une certaine connaissance du « monde réel » l’ayant doté d’une réelle empathie, si rare dans la classe politique. François Bayrou est tout sauf la caricature calculatrice que l’on veut parfois en faire. Sans être aussi gaullien qu’il le souhaiterait, la vraie grandeur lui faisant défaut (moins qu’à ses adversaires, néanmoins), il est tout de même une sorte de chêne, animé d’une vraie flamme au cœur de laquelle se nichent de profondes convictions où il est question d’idéal républicain, d’humanisme, de solidarité, de sens de l’État et de quelques autres valeurs qui font tant défaut à notre société, aussi blasée qu’individualiste, aussi peu généreuse que prompte à manier de pompeux concepts dont elle ignore le sens et l’essence.

Ce n’est peut être pas la panacée, mais à l’heure où la politique se résume à un fainéant storytelling sourcé à la télé réalité, Bayrou n’est sans doute pas le pire candidat et encore moins le légitime motif de tant de moqueries. En tous cas, c’est ainsi que je le perçois, moi qui suis las d’attendre une gauche qui arriverait à concilier une indispensable vision populaire avec le sens des responsabilités, choses qu’elle ne parvient pour le moment pas à envisager, à moins d’un futur sursaut inspiré des récents travaux de Laurent Baumel, François Kalfon, Laurent Bouvet et d’autres*.

Sondage BVA pour Le Parisien du 07/12/2011 *

« Plaidoyer pour une gauche populaire » / Le Bord de l’eau 2011 / 116 p**

Retrouvez l’article de Benjamin Sire en cliquant ici.

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Posté par Gilbert Duroux, le 12 décembre, 2011 à 19:33

C’est bien gentil tout ça, mais vous ne dites rien sur le fait que la politique de Bayrou est une politique de droite, et pas du centre (de toutes façons, le centre tombe toujours à droite). Vouloir augmenter de 2 points la TVA, c’est la mesure la plus antisociale qui soit. La TVA est l’impôt le plus injuste car il touche d’abord les pauvres. 2 % d’augmentation de la TVA, c’est 2 % de pouvoir d’achat en moins pour les pauvres, vu que les pauvres dépensent le peu qu’ils ont.