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Bayrou : l’homme qui murmurait à l’oreille des enseignants

Depuis quelques années, un toc vient perturber le débat électoral, laissant s’inviter des thèmes et des slogans qui flattent les instincts primaires sans pour autant parler de l’essentiel.

En 2002, il fut question d’insécurité ou du sentiment d’insécurité, quand la France d’alors quittait sans le savoir les rives prolifiques de la croissance pour aborder sans précautions les falaises les plus dangereuses de la Crise. En 2007, la campagne fut tout d’abord cosmétique avant de s’enliser dans un travailler plus pour gagner plus qui fit long feu. Et de décliner à nouveau le tout sécuritaire à grands coups de Kärcher pour siphonner les voix de la force obscure… Et depuis quelques mois, alors que se profile 2012, l’islam semble l’ennemi juré, le bouc émissaire choisi pour expliquer la récurrence de nos maux. Une dérive qui n’a pas échappé à François Bayrou, qui publie ce jeudi, 2012, Etat d’urgence :

« Je pense que les temps sont lourds, qu’ils sont des relents d’années 30. Et l’on retrouve d’ailleurs les mêmes tentations, noires. On détestait le juif, on déteste le musulman. Et encore, on n’a pas tout vu. On ciblait l’étranger, rital ou pollack, on cible un autre étranger, arabe, berbère ou africain. »

Pour autant, pas question de se voir les Français se voir voler les vrais débats à l’heure où le temps est compté :

« Je suis arrivé à la conclusion que nous avons devant nous deux questions d’urgence nationale, et deux seulement. La première : ‘produire en France’. Retrouver la production dont nous avons perdu des pans entiers, pour reconquérir l’emploi et pour équilibrer nos comptes. Et le seconde : rendre à la France ‘la meilleure éducation du monde’. ».

Et d’ajouter :

« Toute les difficultés qui nous paraissent insurmontables proviennent de ce double échec. »

Revoilà donc l’ancien Ministre de l’Education enfourcher le cheval de bataille qu’il affectionne tant : l’école. Et François Bayrou d’être l’homme qui murmurait à l’oreille des enseignants. Et il s’en rappelle à son bon souvenir :  « Le monde enseignant a pour une large part voté pour moi en 2007. »

Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, François Bayrou sait combien la campagne est rude et comment les adversaires s’ingénient à instrumentaliser le passé et l’Histoire, pour décrédibiliser l’avenir. Aussi,humblement, le Président du MoDem s’astreint au droit d’inventaire.

De ses années passées au Ministère, il ne garde pas le souvenir noir qui semble ronger ceux qui ont été, contraints ou forcés, à tenir la baraque Rue de Grenelle, bien au contraire :

« J’ai été un ministre de l’Education profondément heureux, en un ministère où on l’est rarement. Je ne crois pas exagérer en disant que le monde de l’école l’a compris ? Pas seulement le monde enseignant : l’enquête d’opinion qui étudie régulièrement la satisfaction des parents par à l’école atteignait, à l’issue des quatre années où j’ai exercé cette responsabilité, le plus haut degré de satisfaction jamais enregistré ».

De ces années, il n’évoque qu’une affaire. Sans doute celle qui restera malgré lui marquée dans l’opinion, et que ne cessent de brandir ses adversaires ou les Tartuffe, docteur es opportunisme :

« L’affaire Falloux m’a coûté, mais elle m’a beaucoup appris. Elle a mis de centaines de milliers de personnes dans la rue contre un texte qui ne méritait pas tant d’indignité, puisqu’il visait seulement à permettre aux collectivités locales d’aider l’enseignement privé à réparer ses bâtiments ou à en construire si besoin. Ce qui se faisait et se fait sans le dire tous les jours par diverses ruses juridiques. Disons de suite que je portais la responsabilité de cet échec. J’ai voulu batailler et remporter la bataille. J’étais jeune et gascon. La vie s’est chargée de me corriger les excès de l’un et l’autre de ses états. »

On le voit, pas de dérobade ici. François Bayrou assume son manque de pédagogie qui concourut, selon lui, à un malentendu malheureux. D’autant plus malheureux, qu’il est constamment brandi pour discréditer une laïcité pourtant largement revendiquée, assumée et même épousée :

« J’étais un fils de la laïque (…) Et je me trouvais accusé par ceux que j’aimais le plus, pas seulement par l’opinion anonyme, mais par des femmes et des hommes que j’avais connus et aimés filles et garçons, de trahir l’idéal qui m’était le plus cher. C’était un quiproquo. Et le quiproquo m’était plus blessant qu’aucune accusation fondée. »

Mais comme il le dit, « par chance, le quiproquo a pu être levé ». Et le monde enseignant ne lui en a pas tenu rigueur. François Bayrou en explique les raisons :

« Je n’ai jamais cessé de le défendre, dans sa réputation et dans ses valeurs. Trois de mes enfants ont choisi à leur tout de faire leur métier de cette vocation ».

2012, Etat d’urgence n’est de ce point de vue là pas en reste. Non content de replacer l’éducation au centre des débats, il entonne un refrain, que les politiques et les médias, ont depuis longtemps, trop longtemps, cessé d’ânonner au profit d’une oraison funèbre qui cloue les professeurs au piloris des incapables, des profiteurs ou pire des privilégiés :

« Jamais depuis cent ans au moins l’école –ceux qui la font, ceux qui y sont- ne s’est sentie à ce point incomprise et rejetée. Méprisée. Prise pour cible. Vilipendée. (…) Les enseignants ont encaissé offense sur offense, traités de fainéants, d’absentéistes, d’incompétents, par tout ce que l’univers politique et médiatique compte de juges et de procureurs à la petite semaine. »

La sortie spectaculaire sur la question de Ségolène Royal lors de la campagne 2007 illustre parfaitement le propos, et montre que même à gauche, la rupture est entamée.

Mais les raisons qui ont poussé certains à se voir crédibiliser dans ce type de diatribe ne tient pas qu’à l’aveuglement et à la mauvaise foi. Il est aussi indéniablement une des conséquences collatérales de la faillite de l’école tout entière. Une école qui ne parvient plus à atteindre ses objectifs, une école qui laisse 20% de ses élèves entrer en sixième sans maîtriser les fondamentaux, et une école qui échoue à les faire progresser puisque les mêmes proportions quittent le système scolaire sans diplôme et sans formation.

Pire, l’école n’est plus hermétique aux différences sociales qui fracturent notre société : « Bourdieu jadis n’avait pas tort. Désormais, il a terriblement raison. Dans une école au rabais, seuls les héritiers tireront leur épingle du jeu ».

« Chansons » reprendront en hommage à Madame Jourdain, ceux qui ont mille fois entendu ces discours de compassion tout en voyant voir s’appliquer des pansements sur des plaies béantes, et le docteur devant administrer le traitement de devenir l’unique responsable de tous les maux. A droite, on connait la chanson.Mais en est-il différemment à gauche quand on prétend vouloir remettre les postes des enseignants qui ont été supprimés sous la droite, sans changer la ligne pédagogique et pire, en envisageant même un allongement de la durée de travail des enseignants et en remettant aux principaux et autres proviseurs la liberté pédagogique que l’on volera aux professeurs ?

Pour François Bayrou, il est temps de prendre les problèmes les uns après les autres. Avec vérité. En replaçant l’enseignant au centre de la transmission des savoirs.

Aussi quand droite et gauche évoquent à l’unisson la remise en question des 18 heures de cours, François Bayrou s’offusque :

« Demain c’est leur temps de travail qui sera attaqué, à la suite, « naturellement », d’une « large concertation ». Dont on connait le résultat à l’avance puisqu’il a été décidé à l’avance (…). Personne pour expliquer qu’une heure de cours, ce sont des heures de préparation, de corrections, de lectures, de butinage intellectuel, pour essayer tous les jours un peu mieux, de comprendre ce qu’on enseigne, et de mieux l’enseigner. C’est comme si on disait que les journalistes, à dater de l’année prochaine, devront être plus présents en permanence au journal, ou les députés en permanence à l’Assemblée, ou les comédiens 35 heures sur la scène. Où trouveraient-ils, auprès de qui, la matière de leurs articles, la substance de leurs discours, l’émotion de leur jeu ? »

Et le Président du MoDem d’expliquer :

« Il est des métiers pour qui le travail, c’est la présence effective. Et d’autres pour qui la présence au poste de travail n’est que l’accomplissement de toute une préparation extérieure. »

Quand la droite et la gauche s’accrochent sur la question des postes, François Bayrou tempère : « La question des moyens n’est pas pour moi la question principale. Cependant c’est une question qui compte ». Et le Béarnais de replacer la véritable économie faite par le Gouvernement Sarkozy sur le dos des enseignants à son niveau le plus juste : le presque néant : « Les coupes sévères qui ont été faites dans les emplois publics n’auront au bout du compte permis que de bien faibles économies (…) 0, 5 milliard, 0,3% du déficit ! »

Aux plus hargneux sur cette question, certainement les plus aveugles, il enfonce même le clou : « Et dois-je rappeler, à ceux qui trouvent que l’enseignement est trop cher, quel serait le coût de l’ignorance ? »

Non, définitivement non, la question des moyens n’est pas la priorité. Raison de plus pour ne pas continuer ce déchiquetage, d’autant que l’on est sur le point de ronger l’os. Pas question non plus de promettre les créations d’emplois par milliers comme semble le faire la gauche, sans donner d’autres moyens pour rétablir nos Finances publiques que de s’en remettre à la Providence. On se souvient qu’en 2008, Ségolène Royal, elle-même, avait portéun regard sévère sur ses propres promesses qu’elle estimait irréalisables au bout du compte…

Pour François Bayrou, la priorité est donc de réhabiliter le professeur de lui rendre le respect qui lui est dû. Et nul besoin pour cela des artifices dont on veut nous vanter les mérites depuis des années, et qui participent encore et plus à la dangerosité de la situation :

« Tout enseignant doit être respecté dans sa classe. Et ce qui doit le protéger , ce n’est ni un deuxième enseignant, ni un surveillant, ni un policier, mais l’Education nationale tout entière et le prestige rendu à sa mission. »

Comme il l’écrivait il y a vingt ans, déjà, dans son premier ouvrage La Décennie des mal-appris : « Marre qu’il faille être à la fois Tarzan et Socrate pour faire cours dans l’école française ». « Je n’ai pas changé d’avis. » conclut-il…

Au-delà de ce principe fondamental, la pédagogie rentre en jeu. Comme souvent, à ce petit jeu, chacun a ses idées, ses aspirations et veut laisser sa trace. Les pédagogistes de Mérieuet les Républicains de Brighelli tentent d’intercéder pour vaincre dans cette bataille des idéologies. Une réforme contredit l’autre. A en perdre son latin. Hors de question de reproduire cette hérésie qui compte pour beaucoup dans la déficience de nos résultats, y compris sur des sujets aussi cruciaux que les méthodes de lecture, qui ont animé de manière pavlovienne les débats ces dernières années :

« Comme tout le monde, j’ai mes idées sur les bonnes, moins bonnes, et très mauvaises méthodes d’apprentissage de la lecture. Ou du calcul. Mais c’est condamner à mort une méthode que de prétendre l’imposer par une décision du sommet. J’avais dit cela à Gilles de Robien lorsqu’il décida d’imposer par un ordre ministériel le retour généralisé à la méthode syllabique. (…) Mais surtout accepter qu’un ministre s’autorise à imposer une méthode, c’est accepter qu’un autre ministre prenne deux ans après la décision contraire, et, par exemple, impose de sa propre autorité ma méthode globale. »

Pour le reste, François Bayrou propose certaines mesures qui risquent de faire grincer des dents. Il n’en a cure : « On m’accusera d’être ‘réac’. Tant mieux. »

Rappelant qu’il existe « un objectif précis : la transmission des fondamentaux »,  il « affirme donc que tous les moyens intellectuels de l’école doivent être dirigés vers ce but simplissime : garantir la lecture, l’écriture et le calcul mental à 100% des élèves au moment de l’entrée en sixième. »

Concernant la formation et l’évaluation  des professeurs, discréditée à l’époque de l’IUFM, et en réaction vile et stérile anéantie par la droite, François Bayrou propose : « l’étude systématique du travail accompli par les enseignants qui obtiennent les meilleurs résultats avec le même type d’élèves. Et le partage de leur démarche pédagogique. » L’évaluation des professeurs, que veulent imposer certains au nom de la méritocratie, « ne doit pas être autre chose que la méthode pour repérer les pépites dans la mine d’or. »

Concernant les décrocheurs, perturbateurs, que le collège unique, inique, a laissé prospérer sans y remédier dans les classes, il propose « un recours effectif » : «  Il faut que la sanction ouvre la voie à d’autres pédagogies, d’autres surveillances, d’autres prises en charge psychologiques. Non pas sous forme d’éviction définitive, mais dans le but de ramener dans la scolarité normale un élève effectivement rétabli dans un meilleurs équilibre et dans une meilleure capacité scolaire. »

Les programmes scolaires, quant à eux, doivent être lisibles et compréhensibles de tous et seront de ce fait« arrêtés après un débat au Parlement, qui obligera les rédacteurs à rien y écrire de jargonneux. »

Le nivellement par le bas du niveau des élèves pour cacher la misère de nos résultats est terminé : « Les objectifs de l’école, du collège, du lycée, au lieu d’être perpétuellement dévalués doivent se voir réévalués. ».

Et François Bayrou ne lésine pas alors sur les moyens : « A la question : mais que faites-vous des élèves en échec à chaque niveau ? (…) une scolarité de rattrapage adaptée. On dira que cela coûte cher ? Cela coûte moins cher que 20% d’échecs sans recours. »

Concernant la pédagogie, il dénonce aussi « toute l’idéologie dominante à l’école, (…) des petits groupes, y compris même à l’université. », remettant clairement en cause les inflexions successives des ministres de l’Education depuis une décennie. « La formation à l’autonomie devant le savoir » doit être la priorité.

Enfin, parmi les mesures les plus notables, relevons la dimension propédeutique que doit revêtir la classe de Terminale afin de préparer au mieux les futurs étudiants.

Ajoutez à cela, l’école des parents, l’arrêt des réformes successives et leur fixation dans le temps et vous aurez le concours complet de l’homme qui murmurait à l’oreille des enseignants. Qui osera dire aujourd’hui que la campagne présidentielle qui s’annonce ne s’intéresse pas à notre école ?

 

Retrouvez l’article d’Yves Delahaie directement sur son blog en cliquant ici.

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yvesdelahaie
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Posté par gilco, le 19 août, 2011 à 08:41

je ne m’étendrai pas sur le sujet :
Je constate dans les commentaires à la présentation de son livre que François BAYROU, met l’accent sur les 2 urgences pour la France.:
– la production
– et l’éducation nationale.
Je suis entièrement d’accord pour une réforme profonde de l’éducation nationale pour, tout d’abord :
1°) faire en sorte que tous les enfants sortent du collège en sachant lire, écrire, compter et comprendre : aucun ne doit être laissé de coté. Il faut mettre en place la structure qui le nécessite….
2°) Toute l’éducation doit être faite pour l’enfant et son role dans la société. Autrement dit la sélection, l’orientation, les moyens doivent être donnés à chacun en fonction de ses aptitudes et, DES BESOINS DE LA PRODUCTION….Ne pas former des gens dans des métiers sans débouchés.
L’orientation est quelquechose de capitale et doit commencer dès le plus jeune age et se poursuivre pendant toute la scolarité.
3°) Concernant la suppression d’un départ à la retraite sur 2 : Cette opération a été très mal faite dans l’éducation nationale comme ailleurs : il ne s’agit pas de supprimer un productif sur 2, mais procéder à un audit et remplacer des non-productifs par des productifs ???
Combien d’enseignants n’enseignent pas ??? combien n’enseignent jamais dans leur vie ???? ce sont des gens que j’appelle « théodules »
C’est l’affaire de toute la fonction publique, il ne faut mettre en cause la suppression opérée, mais la manière dont elle a été faite ? il fallait procéder d’abord à un AUDIT , administration par administration et faire la chasse aux emplois inutiles….
Je l’ai déjà dit par ailleurs et, en reparlerai….
TOUT est lié, bien sur, mais l’enseignement et la production tout particulièrement (je l’ai dit et redit !!!!)

Posté par jifi, le 19 août, 2011 à 16:35

Le nombre des enseignants est faux !!!!! Tous les gens qui ont le concours et qui sont titulaires sont comptés pour 1 enseignant
1 enseignant qui travaille dans une classe à plein temps est compter pour 1

Au même titre les temps partiels, les membres du RASED, les coordinateurs, les conseillers péda, les enseignants referant, les directeurs déchargés ou pas les personne en longue maladie, .. et j’en passe.
Tous ces gens comptent pour 1 entier.
C’est bien pour cela que l’on peut endormir les gens avec des faux chiffres bientôt on va nous dire qu’il y a un enseignant pour 10 élèves en primaire…
Mais ils prennent les gens pour des idiots naifs.

Cette année c’est le ponpon !
des étudiants en master 2 ont eu la priorité sur des postes de titulaires lors du mouvement des enseignants et auront une classe à temps partiel en responsabilité.
Des stagiaires sont passés en priorité et auront eux aussi une classe à plein temps en responsabilité sans savoir s’ils seront titularisés en juin.
ON MARCHE SUR LA TETE

Posté par gilco, le 19 août, 2011 à 18:34

à JIFI, que voulez vous dire exactement :
ce que je pense c’est que les gens inscrit à l’éducation nationale n’enseignent pas tous et certains n’enseignent jamais….
C’est précisément une précision là dessus que j’attends et, la raison pour laquelle j’appelle un AUDIT dans toute l’administration car le problème est vrai partout…..
C’est une priorité …..