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Les citoyens, modérateurs de l’urbanisme

Dans une opération d’urbanisme classique, la majorité des intervenants ont un rôle à la fois bien identifié et codifié (collectivités publiques, architectes, bureaux d’études techniques, promoteurs, économistes) et seul reste difficile à cerner le niveau d’influence que peut avoir le citoyen sur le déroulement du projet.

Le citoyen est amené dans le cadre de la procédure actuelle à s’exprimer lors des réunions publiques ou sur le registre des contributions afférents à l’enquête publique pour faire connaître son opinion sur le projet  et/ou proposer des pistes d’amélioration de ce projet. Il peut également rencontrer le commissaire enquêteur pour lui expliquer et lui détailler sa contribution avant que ce dernier ne produise son rapport final avec les observations et réserves correspondantes qui seront soumises au vote des élus. Il a  donc avant tout un rôle de modérateur.

Dans ce mode de fonctionnement, apparaît clairement en filigrane le principe de différenciation des ordres cher au philosophe Pascal qui s’attachait à séparer le pouvoir, le savoir et le croire. Dans un processus d’enquête publique urbanistique, le pouvoir de décision revient aux élus. Le pouvoir financier est détenu par les promoteurs qui investissent dans la réalisation du projet en espérant un retour rapide sur investissement. Le savoir est sensé être détenu par les concepteurs du projet  où œuvrent ensemble les architectes, les techniciens des bureaux d’études et les paysagistes.

Le citoyen est donc le détenteur du croire, ce qui veut dire qu’il doit s’approprier le projet pour y adhérer. Pour que le citoyen puisse s’approprier le projet, ce dernier doit faire l’objet d’une large publicité sans commune mesure avec la quasi confidentialité trop souvent constatée. En matière d’urbanisme, le citoyen doit être un partenaire actif dans le cadre d’une démocratie participative synonyme de démocratie d’implication et de responsabilité. Il n’a pas donné aux élus un blanc-seing en matière de construction et ne donc faire à ces derniers une confiance aveugle. Il n’a pas non plus à faire preuve d’une méfiance de principe qui n’aurait rien de féconde. Il doit en fait utiliser son pouvoir de défiance qui va constituer pour les élus et les concepteurs un aiguillon les incitant à optimiser le projet.

Ce fonctionnement idyllique théorique connait bien des dérives le plus souvent au profit des promoteurs et au détriment du citoyen dans une société ou le financier l’emporte trop souvent sur le politique. Les enquêtes publiques récentes relatives à la RD7 et à la tour Triangle ou les élus semblent faire fi de toute opposition sont révélatrices en la matière. A l’inverse, la prolongation de l’enquête publique en cours sur le projet rue Telles de la Poterie suite à une contribution massive des citoyens incite davantage à l’optimisme. La question de fond est de savoir comment faire d’un citoyen écouté un citoyen entendu. Je suis à titre personnel partisan d’une disposition législative nouvelle imposant une consultation locale pour tout projet d’urbanisme changeant de manière significative l’agencement ou l’esthétique d’un quartier. A notre niveau local  il serait pertinent de connaître jusque dans quelles limites les Isséens sont prêts à accepter une croissance démographique et une augmentation de la surface de bureaux disponibles.

La résolution 25 examinée lors de la dernière séance du Conseil Municipal s’est attachée à définir le taux de la nouvelle Taxe d’Aménagement, ce qui constituait une obligation légale. Le taux retenu de 5% permet certes une exonération pour les programmes de logements sociaux, ce qui est une bonne chose mais n’interdit pas via des procédures de révision simplifiée du PLU de densifier fortement une zone par le biais d’une nouvelle résolution votée en séance plénière du Conseil Municipal et donnant lieu à une enquête publique préalable. Comme nous l’avons indiqué dans notre tribune du mois de novembre du journal Point d’Appui, il est donc essentiel que les citoyens participent nombreux  à toutes les enquêtes publiques en cours et à venir car la participation massive est à l’heure actuelle la seule disposition légale permettant aux citoyens d’exercer pleinement leurs rôles essentiels de modérateurs de l’urbanisme.

Retrouvez l’article d’Etienne Béranger directement sur son site en cliquant ici.

Photo par Edouard Mortec

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