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Bayrou, au nom du père, du fils et du Saint Laïque

Le président du MoDem est un fervent chrétien pratiquant. Pour autant, cela l’empêche-t-il de se poser en tant que défenseur de la laïcité ?

Ce n’est pas toujours facile d’être chrétien, catholique, pratiquant tout en étant un des défenseurs les plus acharnés de la laïcité. Pourtant, François Bayrou se revendique autant de l’un que de l’autre. « Incompatible », railleront certains et il en sera en 2012 comme il en fut en 2007 ou encore en 2009 lors des européennes.

Seulement si la laïcité se mesurait à l’aune de sa non croyance, voire de son athéisme, nul doute que certains de nos femmes et hommes politiques en seraient le meilleur garant. Las, il suffit de voir notre président de la République, qui n’a rien d’une grenouille de bénitier et qui n’a pas hésité à faire l’étalage dans un livre d’une nocivité sans nom La République, les Religions, l’Espérancedes avantages de la laïcité ouverte (quand l’adjectif « laïque » doit être un adjectif relationnel et non avec épithète comme le suggère également Jean Baubérot), qui n’ a pas hésité à se déclarer en 2003 pour un financement des lieux de culte afin de mieux « contrôler » l’Islam de France et qui n’a pas hésité surtout à faire allégeance au Pape l’été dernier comme pour expier ses fautes dans l’affaire des Roms pour se convaincre du contraire. Non, véritablement, non, ce n’est pas à sa mécréance que l’on peut jauger votre laïcité.

Pour François Bayrou, il en va de la foi comme de la laïcité : les racines sont profondes, les intentions sont sincères, mais la pratique peut parfois laisser planer quelques doutes. Et ce sont dans ces brèches que ses détracteurs préfèrent entrer en y mettant une lumière ostentatoire, oubliant qu’au-delà du lièvre débusqué, la tanière est pourtant irréprochable dans ses moindres recoins.

Car s’il est un homme qui insiste, sans coup férir, sur les bienfaits de la laïcité, c’est bien le député béarnais. Chacun de ses livres y consacre un ou plusieurs chapitres. Avec à chaque fois, une position sans ambiguïté. D’autant plus limpide qu’il n’aurait guère recours à des nègres pour les écrire, une rareté dans le monde politique.

Le protecteur absolu de la laïcité

« La France est laïque. Ce n’est pas seulement un choix politique, c’est devenu notre caractère national. Je le dis d’autant plus que je suis croyant, et même pratiquant comme on dit. En même temps, du même mouvement, je suis défenseur et je serai protecteur absolu de la laïcité. La laïcité, c’est ce qui permet aux croyants de différentes religions, de différentes confessions, aux incroyants et aux agnostiques de vivre ensemble sans que nul n’ait la tentation d’imposer aux autres la loi de sa communauté. La Laïcité, c’est ce qui sépare la foi de la loi. », dit-il dans Projet d’Espoir.

A Nicolas Sarkozy qui voulait modifier la loi de 1905, François Bayrou répondait avec fermeté un « non » définitif dès 2007, dans Confidences : « Il y a plein de communes qui financent la construction de mosquées. Vous faites un bail emphytéotique, comme on dit, de 99 ans, et puis la question est réglée. C’est permis par la loi, mais l’idée que l’Etat se mêle par exemple de payer les imams est une idée que je ne trouve pas laïque. »

Et c’est d’ailleurs dans l’adversité et la condamnation que souvent François Bayrou trouve de la hauteur, morale et civique, comme ce fameux soir, où plus que tout autre présent sur le plateau, il avait clairement démasqué les mensonges des prophètes du Président, l’un niant par ignorance, l’autre par tartufferie :

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Même Jean-Luc Mélenchon, pourtant avare en compliments, et qui n’est pas du genre à se laisser impressionner sur la question de la laïcité, comme le montre avec brio sa démonstration de force face à Marine Le Pen, la nouvelle convertie de la sainte laïcité, sur le plateau de BFM le 14 février dernier, le confessa dans… Valeurs Actuelles le 11 décembre 2008 (cela ne s’invente pas).

« Le comportement de Bayrou évoque le PS des années 1980. Il a une vraie rigueur sur les questions importantes. Il peut gagner en 2012. C’est un littéraire, ça s’entend à l’oreille, ce n’est pas une de ces têtes d’œufs technocrates qui encombrent le devant de la scène. Sur la laïcité, il a su trouver les mots justes. Mais il était crédible parce qu’il a eu le même comportement à l’égard du dalaï-lama que du pape. Les socialistes étaient aphones une fois de plus. (…) Mes chers camarades ont préféré faire les clowns à Nantes avec des écharpes autour du cou aux causeries religieuses du dalaï-lama. »

Polémique sur la réforme de la loi Falloux

Alors irréprochable François Bayrou sur la laïcité ? Certains de ses détracteurs le contestent et ne cessent de pointer un décalage entre des prises de position régaliennes et moralement inattaquables et des pratiques plus diffuses. Il faut bien avouer que certaines de ses décisions passées l’ont rendu suspect aux yeux de certains.

Et au premier rang d’entre elle, la fameuse réforme de la loi Falloux, qu’il soumet à l’hémicycle en 1993 concernant le financement des établissements privés. Son projet propose de permettre aux collectivités locales de financer sans restriction la construction et l’entretien des établissements d’enseignement privé. Pour lui, il n’y avait pas entrave à la laïcité puisqu’il considérait que l’on ne devait pas faire de différence entre un élève du public et un élève du privé. En cause la vétusté de certaines infrastructures du privé qui, faute de financement, menaçaient de s’écrouler et de blesser des élèves et des enseignants. Il payera ce qu’il confessera être une erreur au prix cher : un million de personnes défileront dans la rue pour y défendre, selon eux, les principes de la laïcité.

Puis arriva 2004. Cela faisait déjà bien longtemps que le président de l’UDF d’alors avait rompu les ponts avec la droite traditionnelle en général et la politique chiraquienne en particulier. La raison de son ire ? La volonté du président de la République d’édifier un grand parti unique, l’UMP, alors même qu’il avait élu avec davantage de voix de gauche le 5 mai 2002. Bayrou y voit la volonté d’instaurer un système bipartite à l’américaine, quand lui estime que la France et surtout la voix des Français est plurielle : « En France, les partis majoritaires ne sont pas majoritaires (…). Les partis majoritaires sont minoritaires. Au mieux, ils sont à trente, au plus bas ils sont à seize. Et ce sont ceux-là qui trustent, qui monopolisent la représentation. Ce n’est pas juste et ça empêche que les Français aient confiance dans le débat », confesse-t-il à l’équipe du PoliTIC’Show le 21 octobre 2006.

Est-ce la raison pour laquelle il s’abstient de voter la loi contre le port de signes ostentatoires à l’école voulue par Chirac alors qu’il s’était montré contre le port du voile dans les établissements scolaires quand il était Ministre de l’Éducation ? Le président du MoDem s’en défend auprès des étudiants journalistes de Sciences-Po le 27 avril 2011, qui lui affirmaient qu’ils avaient du mal à le suivre : « Je suis contre le port de signes religieux ostentatoires à l’école. La société française ne supporte pas que la règle religieuse soit supérieure à la règle civile. Mais cela selon moi, relevait non pas d’une loi, mais du règlement intérieur des établissements ». Il est vrai que la loi de 2004 ne faisait que renforcer la loi déjà existante dans le domaine. Et Bayrou se rappelle surement qu’à son époque une simple circulaire avait largement suffi.

Régulièrement attaqué sur ses croyances

Cela montre en tous cas, que même paré des meilleures intentions, François Bayrou est attendu au tournant. Sans doute parce qu’on le sait très martial sur la question et ses remontrances sonnent parfois comme des leçons de morale que les pourfendeurs de la laïcité ont dû mal à digérer. Surtout parce qu’on sait que la matière religieuse est une zone éminemment sensible chez ce catholique pratiquant, et que la moindre attaque sur la question le blesse plus que tout. Ad hominem.

Dominique Paillé s’en est parfaitement souvenu, lui qui fut son bras droit avant d’être irrésistiblement attiré par les sirènes sarkozyennes qui promettaient des maroquins si glorieux comparés aux traversées du désert promise au Béarnais. Dans son pamphlet, Les habits neufs des faux centristes, il promit en avril 2009, de déshabiller le troisième homme de la Présidentielle en le rhabillant pour l’hiver par la même occasion. Et d’attaquer froidement sur les croyances de son ancien ami : sur la réforme de la loi Falloux, il dégaine : « Il tenait là un sujet de combat idéologique, conforme à ses engagements chrétiens » avant d’ajouter : « il ne m’a jamais pardonné ma laïcité militante ».

Mais sa plus forte charge sur la foi de l’homme est inscrite dans un chapitre intitulé Dieu sait tout, Bayrou est son prophète quand il assène : « J’ai pu constater qu’au cours de cette période de retraite (…) il avait passé une très grande partie de son temps à la messe ou en méditation à Saint-Pierre-du-Gros-Caillou, la paroisse dont dépend sa résidence parisienne ». Ou de rappeler qu’il passait « le plus clair de son temps rechercher l’éclairage divin pour arrêté position ». Il ajoute tout en nuance : « François Bayrou est une sorte d’autiste dont le seul interlocuteur dans les phases d’introversion est Dieu » avant de conclure : « car c’est aussi un aspect à la fois sympathique et anxiogène du personnage : le dilettantisme. Persuadé que la Providence lui réserve un destin exceptionnel, il s’exonère à bon compte du travail et d’un investissement personnel indispensable à la réussite ». Rappelons que dans son livre qui connut un anonymat assez conforme à la qualité de l’écriture, il était question de rappeler ce qu’était le Centre… On le voit, les violences faites aux personnes ont bel et bien progressé sous l’ère Sarkozy.

Mais la plus lourde humiliation que subit sur la question de la foi François Bayrou, resta cette tribune sarcastique des plus violentes quand on sait la piété du personnage, faite par Daniel Cohn-Bendit à Toulouse en marge des européennes.

La réaction, on le sait, fut sanguine avec en réponse la fameux clash de l’émission d’Arlette Chabot à quatre jours du scrutin. Preuve s’il en était de Cohn-Bendit savait là où il touchait (il avait d’ailleurs repris la confidence de Nicolas Domenach qui racontait cette fameuse théorie sur les candidatures à plusieurs chiffres de la Présidentielle).

Pour autant, Bayrou manque-t-il à la laïcité parce qu’il croit comme tentent de le distiller ceux qui veulent le voir trébucher ? Il ne nie en bloc et le rappelle avec clairvoyance dans Abus de Pouvoir :« La vie a fait que je suis engagé pour défendre la laïcité et que je suis croyant. Et même ‘pratiquant’, comme on dit. C’est comme ça. C’est ma vie. Et je n’y vois aucun paradoxe, au contraire. Pour moi, c’est une seule et même logique de libération, d’émancipation, particulièrement lorsqu’on se reconnaît dans le christianisme, puisque le Sauveur a lui-même ouvert cette voie révolutionnaire : ‘Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu’. »

Bayrou l’a dit et répété : c’est parce qu’il est si croyant qu’il est si laïque, comme le côté pile et le côté face d’une même pièce. Se rappelant que sa foi en la laïcité lui garantit avant tout sa liberté de croire tout simplement.

 

Retrouvez cet article directement sur le blog « Les nouveaux Démocrates » en cliquant ici

Photo : Soazig de la Moissonière

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yvesdelahaie
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